@vogue

 

 

 

C’est quoi, en fait, une it girl ?

 

Il vous est sûrement plus facile de citer des noms it girls plutôt que de donner une définition précise. Kate Moss, Chloë Sevigny, Emrata, Julia Fox, Bella Hadid, Cara Delevingne ou même Jeanne Damas en France… bref, la liste peut continuer on and on sans mettre le doigt sur ce qui les relie. Pourtant, il est assez facile de dater la naissance de la it girl et de sa dimension vaporeuse. Il s’agit de Clara Bow, protagoniste du film “It” sorti en 1927 et adapté d’une nouvelle de Elinor Glyn.

 

Le terme « it » est défini au début du film comme une qualité qui attire les autres avec une force magnétique. Mouais. Alors oui, on est un peu loin de Alexa Chung et son perfecto en cuir, pourtant Clara Bow est la première égérie d’une lignée qui persiste encore aujourd’hui. The Cut donne quand même quelques critères pour nous aider à la définir un peu plus : « Présence. Perception. Effronterie. Exubérance et Imperfection Par la suite, tantôt Diane Brill, Iris Apfel, Edie Sedgwick ou Jane Holzer ont porté le titre. La it girl a revêtu différents corps (assez homogènes quand même…) jusqu’aux plus contemporaines citées précédemment.

 

Et si on a du mal à définir ce qu’elle est, on sait ce que la it girl n’est pas. Elle est connue de toustes mais pas forcément pour ce qu’elle fait. Elle ne fait aucun effort pour être une icône et pourtant elle inspire des milliers d’autres femmes à être comme elle. Dès que la it girl devient trop connue, trop célèbre, elle perd son statut et devient tout simplement une mannequin, une actrice ou tout simplement une entrepreneuse. Elle est trash mais pas « vulgaire » (emoji yeux bien levés au ciel) et elle ne suit pas la mode, elle la définit. Vous l’aurez compris, la it girl est un fantasme presque intangible et pourtant, sur lequel bon nombre de journalistes s’accordent chaque saison. La it girl fige les critères de beauté de son temps.


 

@edienation

 

 

 

TW : un idéal impossible à atteindre

 

La it girl finit par être ce modèle écartelé entre les traditionnelles figures de la vierge et de la putain. Elle représente cette “femme parfaite”, assez rock pour être sexualisée mais avec un petit air ingénu qui nous permettrait soit de nous identifier à elle, soit de ne pas la craindre. Ce qui fascine particulièrement chez la it girl c’est sa légitimité qui provient majoritairement des femmes et des milieux gays. Certes, elle représente une injonction supplémentaire toujours inatteignable pour les femmes qui la suivent, mais elle est également un symbole pop culture fort et un marqueur temporel très puissant. La it girl est critiquée ou acclamée par ses contemporain·e·s parce qu’elle cristallise tout ce qu’on attend d’une femme à son époque. Pire encore, on lui demande d’être partout puis on la fait disparaître dès qu’une nouvelle it girl débarque. Remplaçant ainsi sa prédécesseure pour un court règne, elle aussi.

 

Certaines ont réussi à devenir presque éternelles. On pense, par exemple, à Kate Moss, la mannequin phare ou à Alexa Chung qui est devenue créatrice de mode et collabore avec le Vogue anglais. Pour d’autres, le conte de fées a tourné au vinaigre assez rapidement. Edie Sedgwick, muse de Warhol qui a considérablement aidé à en faire une it girl, est l’un des exemples les plus parlants. Après des années de gloire, de films, d’argent, de sexe et de drogue, elle prend sa distance avec l’artiste qui la laisser tomber. C’est la descente aux enfers pour Edie qui n’est plus en une des magazines, dont plus personne ne parle à New York et qui meurt d’une overdose de barbituriques à l’âge de 28 ans, loin des projecteurs.

 

Cory Kennedy est, elle aussi, un ange déchu. Représentante des nouvelles it girl apparues avec Internet (grâce à un cliché pris par Mark Hunter, photographe installé), elle est très rapidement suivie par des milliers d’internautes qui veulent en savoir plus sur cette mystérieuse femme un peu trashy. Cependant, cette folie médiatique et la sur-consommation de drogues ont fini par faire plonger Cory dans une dépression nerveuse persistante à l’âge de 16 ans. Ses parents la mettent en pensionnat et on ne la reverra plus jamais en haut de l’affiche.


 

@anokyai

 

 

 

On a trouvé la it-girl 2023

 

Blanches, minces (voire carrément maigres), riches, jeunes et addicts, ces it girls ont été tout aussi victimes du modèle qu’elles ont aidé à ériger. Entre grossophobie, objectivation, classisme et racisme, certaines ont voulu se débarrasser de ces diktats. Il y a eu, par exemple, Paris Hilton et Kim Kardashian, qui, par leur volonté d’affirmer et de définir leur image elles-mêmes, sont passées à côté de la couronne. Mais il y aussi une nouvelle garde qui va encore plus loin. Entre Sophie Fontanel, Grace Nicholson, Anok Yai ou même Hunter Schafer, la it girl est en pleine évolution et on peut maintenant choisir sa it girl, celle à laquelle on s’identifie le plus et qui nous inspire au lieu de nous déprimer.

 

En plus, avec l’arrivée d’Instagram, TikTok et autres Pinterest, on a suivi l’émergence d’une armée d’influenceuses qui pourraient, elles aussi, prétendre à ce statut. Quid de Emma, Georgina, Chiara et autres Lena ou Gucci Gang ? Le fait d’avoir des agent·e·s ou de faire de ce statut de célébrité un business model leur retire-il le laissez-passer au panthéon des icônes ? On préfère prendre un peu de recul sur la fameuse nouvelle it girl 2.0. Dans un monde où l’influence est partout et avec un rôle qui a souvent été fait et défait par des hommes, on aimerait se détacher petit à petit de la it girl.

 

Si on en revient à notre première définition historique, de « it » qui fait référence à ce je-ne-sais-quoi de magnétique, on s’accorde à dire qu’on en connaît un paquet. Nos mères, nos sœurs, nos meilleures copines… Elles l’ont ce je-ne-sais-quoi. Surtout quand la nouvelle génération ressemble à un copier-coller de nepo babies. Alors bye bye Kaia Gerber ou Leni Klum, les nouvelles it girls de cette saison, ce sera nous. Et vous avez de la chance, on est disponibles en plein de modèles différents.