Blackfishing et vote extrême droite : quand les stars de téléréalité s’engagent en politique
Rends le prénom
On ne s’y attendait pas. Même si les stars de la téléréalité ne sont jamais contre un bon coup de pub une bonne polémique, afficher publiquement leurs opinions politiques n’a jamais été bon pour les affaires #partenariats. Nabilla a donc surpris tout le monde vendredi dernier en affichant son soutien à Emmanuel Macron sur Twitter (suivie de près par Maeva Ghennam), mais pas autant que Safia Alba… L’ex candidate des Princes et Princesses de l’Amour s’est empressée de réagir sur Snapchat pour défendre Marine Le Pen. Pourquoi ça a mis le feu à internet ? Parce que Safia Alba s’appelle en réalité Gwendoline Germain, qu’elle ment sur son appartenance ethnique depuis des années et ne se gêne pas pour soutenir l’extrême droite aujourd’hui.
Comme l’écrit elle-même Safia Alba sur Instagram : « les apparences sont souvent trompeuses ». Avec sa sœur également candidate de téléréalité Milla Jasmine (de son vrai nom Marie-Charlotte Germain, on n’arrête plus le culot), elles se sont fait une spécialité de troubler leur audience sur leurs origines.
En 2008, Milla Jasmine se fait appeler Farah, un prénom à consonance arabe, dans une vidéo dans laquelle elle chante Ma philosophie d’Amel Bent. En 2013, elle indiquait sur sa page de modèle aux États-Unis qu’elle était “moitié Chinoise, moitié Libanaise, moitié noire”.
Outre les maths douteuses et le fait de considérer “noire” comme une nationalité, c’est ce qu’on appelle du blackfishing (avec bonus asian-fishing), aka le fait pour une personne blanche de se faire passer pour une personne noire ou métisse (ou asiatique/d’origine asiatique pour l’asian-fishing), en modifiant notamment son apparence.
La journaliste et militante Valérie Rey-Robert décrit ce phénomène dans son tout dernier ouvrage Télé-réalité : la fabrique du sexisme : « On constate en outre que certaines candidates se sont créé un personnage faisant planer le doute sur leurs origines. Deux sœurs, Milla Jasmine et Safia, ont ainsi choisi ces prénoms aux consonances maghrébines, au lieu de Marie-Charlotte et Gwendoline - leurs véritables prénoms. Sans que cela soit explicitement dit, il semble qu'il y ait un côté cool, exotique, à avoir de probables origines de l'autre côté de la Méditerranée. »
C’est problématique parce que les personnes qui font du blackfishing profitent de la vague “trendy” autour des personnes racisées, de leur culture et de leur esthétisme (coucou le nail art, les braids et le twerk), sans subir de racisme, et en évitant soigneusement certaines caractéristiques esthétiques encore discriminées comme les cheveux crépus. Vous avez dit injuste ? On dit nées avant la honte.
Depuis, Milla Jasmine - qui vit à Dubaï - s’est affichée portant une abaya, un vêtement traditionnel musulman doté d’un voile, en se défendant de toute appropriation culturelle, et semble parfaitement assumer sa photo de profil sur Instagram : un Nazar boncuk, une amulette traditionnelle du Moyen-Orient utilisée pour éloigner le mauvais œil. Et est-ce qu’on parle de son « seules les femmes gitanes peuvent comprendrent » sur Snapchat en parlant d’une pince à cheveux ? C’est trop.
Sachant tout ça, difficile pour les internautes d’avaler la pilule quand une femme qui se revendique racisée défend son vote pour la candidate d’extrême droite Marine Le Pen, aux propositions historiquement et ouvertement racistes. Ça pourrait sembler anecdotique, mais Safia Alba réunit plus de 430 000 followers sur ses réseaux entre Insta, Snap et Tiktok. Ses messages ont donc une audience non négligeable. Et Milla Jasmine ? Plus de 360 000 sur Tiktok… et plus de 3 millions sur Insta. Son compte Snap quant à lui, a été supprimé récemment. Une leçon à retenir peut-être.