C’est dans la sainte église américaine du chic 7ème arrondissement de Paris que nous nous sommes glissés (en retard of course), parmi le parterre de modeux déjà installés.

 

Pas de têtes très connues, mais on aperçoit quelques influenceurs par ci, par là, et l’actrice française Déborah Lukumuena, LA star du jour. Le show commencera 25 minutes plus tard que prévu, parfait pour les retardataires.

 

Le carton d’invitation inscrivait For Better or For Worse, avec une écriture baroque et une bague scintillante ornant au milieu. Normal, le couple de créateurs franco-belge Ester Manas et Balthazar Delpierre se marient à l’été 2023, et ont décidé de consacrer leur nouvelle collection automne-hiver 2023-2024 à la thématique.

Au programme, de la sexyness, de la sensualité pour la mariée ou ses invitées. Du blanc pur ou cassé, du rouge (nouvelle obsession = se marier en rouge), du noir, des tons terre et des camaieus de bleus à tomber par terre. Puis comme toujours, des coupes qui vont à toutes les morphologies et ont fait le succès de la marque.

 

 

Ester Manas, la mode au service de l’habillement

 

Il suffit de voir le casting de mannequins composé de toutes les carnations de peau et de morphologies pour comprendre que l’ADN de la marque, qui se présente comme « éco-responsable et inclusive », n’était pas que le discours d’une saison.

Les silouhettes vives avancent sûres d’elles et passent allègrement du mini top court sur un mannequin filiforme, à des volants qui font virevolter des bourrelets, avant des lacets qui enrobent des ventres ronds et fermes. Oui, on en prend plein les yeux. À l’heure où les médias et le public se demandent où sont passés les mannequins « grande taille » aux divers Fashion Week et que la silhouette de Kate Moss est toujours d’actualité; c’est tout sauf anodin.

La génèse de l'engagement

 

C’est en 2018 que les projecteurs ont commencé à se braquer sur ce duo qui préfère se nommer « designers » plutôt que « créateurs de mode » sortis tous deux de La Cambre, the école de mode à Bruxelles. Leur collection « Big Again » leur a fait remporter le prix Galeries Lafayettes au Festival de mode de Hyères.

Celle-ci naît d’une frustration qu’avait Ester de ne pas trouver sa taille, hors fast-fashion. La légende dit que c’est en voyant une table Ikea extensible, qu’elle a eu l’idée de le transposer aux vêtements. Comment habiller les morphologies de manière pérenne, tout en proposant une vraie patte créative ? C’est la réponse à laquelle le couple répond, en proposant des vêtements qui s’adaptent au corps et non l’inverse.

Les coupes évoquent une forme de romantisme moderne, qui ne cache pas les courbes, joue sur les matières de la lingerie au tissu froncé, et étirable à souhait sans avoir à subir les fluctuations corporelles. Nous pouvons l’affirmer : la femme Ester Manas est sexy, voluptueuse, désirable, qu’elle que soit son tour de taille.

En sortant de ce défilé, on se dit qu’il serait peut-être temps pour la mode de comprendre que faire de la place à tous.tes rend tout plus joli et joyeux. Peut-être qu’il serait temps d’arrêter de parler d’inclusivité, mais plutôt le montrer sans rien affirmer : les actions concrètes seront toujours plus efficaces qu’un hashtag ou une tendance.


Jennifer Padjemi