De l’effet de simple exposition

 

L’effet de simple exposition a été théorisé en 1968 par le psychologue états-unien Robert Zajonc comme étant “un biais cognitif qui se caractérise par une augmentation de la probabilité d'avoir un sentiment positif envers quelqu'un ou quelque chose par la simple exposition répétée à cette personne ou cet objet”. Pour simplifier : plus on voit/regarde un truc, disons une vidéo, plus on le kiffe (coucou la pub).

Ce phénomène s’explique par un mécanisme simple de notre instinct. Si on ouvre une porte 10 fois, on pourra l’ouvrir une 11ème sans avoir peur qu’un prédateur se cache derrière. On sait à l’avance que c’est safe. Quand on regarde plusieurs fois un film, on ne craint plus les scènes de tension, on anticipe l’issue des scènes d’action, on est en contrôle, parfaitement détendu·e. C’est pour ça que mater Harry Potter pour la 23ème fois peut ressembler à un festin de comfort food : ce sentiment de sécurité réconforte notre cerveau.

 

Première conclusion : le mode repeat est donc bon pour notre santé mentale, puisqu’il réduit les sources de stress, contrairement aux films qu’on voit pour la première fois #suspens. Mais c’est aussi bien d’alterner, car les découvertes créent de nouvelles connexions dans notre cerveau, ce qui nous permet d’être plus efficaces dans la compréhension et l’action de et dans de nouvelles situations. Mater des nouveaux films is the new smart.

 

 

Double bénef’ sur la santé mentale

 

En 2012, les profs de marketing Cristel Antonia Russell et Sidney J. Levy ont mené une étude sur des personnes qui remataient sans cesse les mêmes films, relisaient les mêmes bouquins ou passaient chaque année leurs vacances au même endroit. Iels se sont rendu·e·s compte que ce mode repeat leur permettait aussi de résoudre des problèmes dans leur vie perso.

En exemple, iels citent une femme qui, à force de regarder le film dramatique Message in a Bottle, a réussi à se remettre d’une rupture. Exactement comme lors d’une thérapie de désensibilisation, qui propose d’exposer graduellement des personnes atteintes de phobie à leur peur pour qu’elles puissent l’appréhender puis la banaliser, cette personne se confronte à répétition à sa peur de l’abandon, de la perte de l’être aimé, jusqu’à apprivoiser ce sentiment et enfin, à passer à autre chose.

 

 

Comment on choisit ces films ?

 

Reste à savoir pourquoi on préfère remater 30 fois Le Roi Lion plutôt que Cloud Atlas ou tout autre film de génie qu’on aurait vu et kiffé une fois adulte. Et bien pour trois raisons.

 

La première c’est qu’on enregistre mieux les souvenirs de nos 10 à nos 30 ans (max). Parce c’est une période de changements perpétuels suivie d’une période de stabilité (qui donne donc le temps de fixer ces souvenirs dans la mémoire), et parce que c’est la période pendant laquelle on forme notre identité profonde. Les souvenirs que vous vous faites pendant cette période, notamment culturels, seront donc les plus puissants pour votre cerveau.

Et là, vous allez nous dire que vous n’avez pas encore 30 ans (pour certaines) et donc l’occas’ de vous créer un nouveau comfort movie en matant jusqu’à épuisement Le Parrain. Sauf que quand vous étiez enfant/ado, votre cerveau vous a fait une offre que vous ne pouviez pas refuser : l’apprentissage par la répétition. C’est la deuxième explication de vos choix de repeat movies.

 

Quand on est enfant on apprend tout, le langage, les interactions sociales, l’humour, les associations d’idées, etc, grâce à la répétition (c’était pas pour rien le par cœur de la primaire au lycée). On apprend donc des basiques de la vie en société en matant Totally Spies, tout à fait.

 

Vous avez donc construit un effet de simple exposition très tôt sur certains contenus : les dessins animés, les mangas, les Harry Potter, les Maman j’ai raté l’avion et autres Twilight (Quoi ? Qui a écrit ça ? C’est pas nous).

Enfin, troisième explication : un film devient votre doudou s’il a fortement résonné avec votre propre vie au moment où vous l’avez regardé. Et, soyons honnête : tout résonne x1000 pendant l’adolescence. Parce que nos hormones sont on fire, que tout prend une dimension planétaire et qu’on est en pleine formation de notre ego, donc tout nous est directement dédié (ou du moins, c’est l’impression qu’on a).

 

Donc pour répondre à votre questionnement de départ : oui, vous aurez toujours envie de mater l’intégrale de Lindsay Lohan, même à 50 piges (hâte).