Le muscle du changement

 

Au mois de janvier, on lisait cet article de l’excellent magazine Causette : Le cerveau, ce vieux réac’. Et comme d’hab’, on a appris pas mal de trucs : par exemple, que notre cerveau a la flemme de changer. En tous cas, au niveau neurologique, puisqu’il a besoin d’habitudes : pour se repérer, pour avancer plus vite. C’est-à-dire, en gros, que votre cerveau est comme vous : il préfère (vous) foutre des plans à la dernière minute pour se refaire les 7 Harry Potter sur Netflix plutôt que de sortir et de rencontrer des gens. Pourquoi ? Parce que c’est plus simple, pardi.

 

Du coup on fait quoi ? Une fois bien enregistrée cette donnée irréfutable, vous tenez entre vos mains une information précieuse : faut bosser. Sur soi. Sans se mettre pour autant la pression de peur de (encore) tout foirer. Et pour ça, rien de mieux quelque part que de rationaliser un bon coup : en comprenant, comme le souligne Causette, que notre cerveau est perpétuellement “en chantier”. Et que changer, c’est en fait travailler à la création de nouvelles connections neuronales qui fabriquent ce qu’à l’échelle de la vie, nous appelons de “nouvelles habitudes”.


Le changement, c’est demain

Restons dans le concret : il faut environ 21 jours pour ancrer une nouvelle habitude dans votre quotidien. Et la première erreur, souvent, est de ressentir une telle urgence à changer qu’on en vient à vouloir tout changer tout de suite : rien de plus con (déso), dans la mesure où Rome ne s’est pas faite en un jour (lol) et vous non plus. Persister à prendre des résolutions de changement avec vous-même à 22 heures chaque soir (que vous vous promettez d’appliquer chaque lendemain matin) est donc particulièrement improductif.

 

Du coup on fait quoi ? Si le spectre de la procrastination vous guette, l’essentiel de votre quotidien consiste à vous fixer des objectifs de changement complètement faramineux (type : perdre 5 kilos en 3 semaines) pour finalement vous vautrer face à l’immensité de la tâche. La clé ? Commencer par prendre de petites décisions, à l’échelle de la vie de tous les jours. Des choses réalisables, qui tiennent compte du fait que le changement n’existe qu’à une seule échelle : celle du long terme.


Y a URGENCE

 

Ceci dit, le gros problème avec l’envie de changer, c’est qu’en général, on n’a vraiment pas envie d’attendre. On est dans l’urgence même, et qui plus est au coeur d’une époque où même la perspective de se taper 15 secondes de générique sur Netflix est devenu tout bonnement impensable. Faut que ça aille vite. Faut speeder un coup. Il faut changer, parce qu’on en a marre de tout. Et de soi, pour commencer.

 

Du coup on fait quoi ? Une fois de plus, on remet les choses en perspective : en comprenant par exemple que ces choses que vous avez envie de faire depuis longtemps (arrêter de fumer, vous remettre à courir, #clairobscur) représentent en fait de sympathiques leviers d’action pour chambouler un peu votre quotidien. Fixez-vous un objectif simple, et un seul à la fois : un rendez-vous avec vous-même pour faire un truc aussi radical et révolutionnaire que de vous couper les cheveux ou d’aller faire une promenade un mardi après-midi. Une partie de vous qui change et (parfois) c’est parti.


Invoquer le plaisir

 

Dans The Science of Self-Control, l’universitaire Howard Rachlin défend l’idée qu’il faut “remplacer les addictions négatives par des addictions positives” : ce qui signifie, en gros, que notre cerveau et nous avons besoin d’une somme de plaisir égale à ce que nous coûtent nos efforts et privations. Se mettre à l’amende pour changer, pourquoi pas, mais il faut donc nécessairement se récompenser aussi. À la clé ? Un basculement jouissif de situation. Un peu comme quand vous avez décidé d’arrêter de fumer et que vous êtes devenue complètement accro au jogging (bis).

 

Du coup, on fait quoi ? On n’oublie pas que changer ne signifie pas foutre sa vie à sac : on peut aussi transiter en douceur. Et puis un changement, se veut, a priori, être positif : alors oui bien sûr, ça implique du travail, et des heures sombres... Mais ça peut aussi passer par de petites choses simples comme changer de décor, boire un coup avec la plus drôle de toutes vos potes, ou mettre 10 balles de côté toutes les semaines pour vous offrir un voyage aux Canaries. Mais oui.


Mais qui êtes-vous ?

 

Quitte à toucher le fond, autant y voir plus clair : et bien sûr, l’envie de changement touche à des questions aussi sensibles que celles de l’identité, du moi, du je veux quoi pour ma vie, du pourquoi j’ai toujours tout raté, du j’ai voulu changer tant de fois mais j’ai pas réussi, du j’ai tant de regrets que si j’avais mille ans (...) : bref, l’immensité de la tâche et de la question, très franchement, nous donne souvent envie d’arrêter de penser pour ne plus arrêter de dormir.

 

Du coup on fait quoi ? Vous voulez devenir quelqu’un d’autre ? Mauvaise nouvelle : c’est impossible. Et c’est peut-être une des clefs du changement que de comprendre que la métamorphose n’existe pas. Que ce n’est pas en ça que le changement consiste mais plutôt en une recherche de connaissance de soi qui permette de travailler sur soi et avec soi, en s’appuyant sur ses forces et en domptant ses défauts (démons ?).

 

Bref : on vous laisse avec ces mots on ne peut plus actuels du philosophe émérite Pharrell Williams : “Like the legend of the phoenix / All ends with beginnings / What keeps the planet spinning (uh) / The force of love beginning / We've come too far to give up who we are / So let's raise the bar and our cups to the stars”.

 

(ha-ha)