Dora Maar, pas la muse passive, la photographe géniale

 

Vous la connaissez peut-être comme “la muse” ou “la maîtresse” de Picasso, mais Dora Maar est bien plus que ça. Photographe surréaliste ultra douée, elle bosse dans la mode et la pub, mais shoote aussi des sujets politiques sur la pauvreté et la rue. Un combo gagnant : à 28 ans, elle est indépendante et gère son propre studio photo, en 1935. C’est à ce moment qu’elle rencontre Picasso, son aîné de 27 piges. On a longtemps parlé de leur histoire comme d’une liaison passionnée, sauf que c’était une relation d’emprise toxique. Ultra encourageant au début, Picasso détruit son estime d’elle-même, l’encourage à arrêter la photo et à se mettre à la peinture - elle perd donc sa source de thune - et la bat violemment. Pendant cette période, elle servira de modèle pour ses 53 tableaux “La femme qui pleure” #ambiance.

Quand Dora Maar commence à faire des crises de colère et d’anxiété -compréhensible-, Picasso l’envoie chez Lacan, qui l’interne et lui fait subir trois semaines d’électrochocs (en gros, il la torture). Traumatisée, elle finit recluse dans la religion et ne partage plus son talent avec le monde. Un move classique pour Picasso, comme le raconte cet épisode du podcast Vénus s’épilait-elle la chatte ? .



Alice Guy, première réalisatrice de fiction

 

Alice Guy a très probablement inventé le cinéma de fiction, oklm. Fin 19e, c’est la secrétaire de Léon Gaumont, qui vend des caméras. Elle a l'idée de créer des histoires pour attirer des client·es, au lieu de filmer des scènes de la vie avec zéro narration. C’est comme ça que naît La fée aux choux, premier court métrage de l’histoire. Ça marche tellement bien qu’elle devient directrice générale des Studios Gaumont, et rebelote aux USA : elle lance le studio indé Solax, qui rencontre tellement de succès… qu’il est racheté par des investisseurs.

Réalisatrice, scénariste et productrice, Alice Guy a créé pas loin de 700 films, mais son taff a été ignoré longtemps. On refuse de publier ses mémoires de son vivant, et les pellicules de ses films sont souvent “égarées”. Mais depuis quelques années, on la remet sur le devant de la scène et c’est plus que mérité.

 

 

Betty Davis, musicienne très en avance

 

En seulement trois ans de carrière, elle a cassé les codes et révolutionné la musique funk et rock. Betty Davis était compositrice, interprète et mannequin dans les 70’s. Pote avec des musiciens connus style Jimi Hendrix, elle se fait une place dans la communauté en composant des sons qui marchent très bien pour d’autres musiciens, avant de se lancer en solo. Elle produit trois albums géniaux qui font scandale, car elle parle sans complexe de cul et de désir. Cette liberté choque : des religieux vont carrément manifester devant ses concerts. Elle se fait aussi lâcher par sa maison de disques et la NAACP (Association Nationale pour la Promotions des Gens de Couleur).

Artiste intègre et indépendante, Betty faisait ce qu’elle voulait et on lui a fait payer cher. Profondément blessée par ces rejets, elle se retire en Pennsylvanie et garde le silence pendant 35 ans. En 2019, elle raconte son histoire dans le docu They Say I’m Different. Quand on voit la vibe des artistes de notre époque, on imagine son succès si elle était arrivée 30 ans plus tard.

 

 

Natalie Clifford Barney, poétesse on fire

 

Dire qu’elle était un cauchemar pour les conservateurs n’est pas exagéré. Née en 1872, Natalie est une héritière américaine qui vit à Paris, lesbienne et famous pour ses histoires avec des artistes, des écrivaines et des courtisanes. Elle écrit des poèmes très hot sur ses aventures, et refuse catégoriquement de se marier. Sa réputation fait tellement scandale qu’elle voyage quelques années aux USA pour calmer les gossips, puis revient en France pour fonder un salon littéraire.

Ses poèmes sont une ode à la sensualité et à la liberté, et malgré les époques bien conservatrices où elle a vécu, elle ne s’est jamais retenue et a aimé des femmes jusqu’à ses 80 ans. Elle est à retrouver dans l’anthologie Je serai le feu de Diglee.

 

 

Artemisia Gentileschi, peintre baroque

 

Pas non plus inconnue au bataillon, Artemisia Gentileschi reste moins famous que ses collègues comme Le Caravage, Vermeer ou Rembrandt pour le grand public. A 17 ans, elle a été victime d’un viol et du procès atroce qui a suivi. Des analyses féministes y voient une motivation pour ses tableaux où elle représentent de nombreuses femmes, notamment sa version très explicite de “Judith décapitant Holopherne”.

D’autres analyses insistent sur l’importance de ne pas présenter son travail uniquement sous cet angle : c’était une peintre caravagienne majeure, une business woman renommée et une femme indépendante. Réputée pour le perfectionnisme de ses tableaux, elle est célébrée de son vivant -au début du 17e- mais zappée pendant 400 ans ensuite. C’est depuis le 20e qu’on rend justice à son œuvre richissime.

 

 

Christine de Pizan, première écrivaine à vivre de sa plume

 

Issue d’un milieu noble privilégié, Christine de Pizan se retrouve à devoir écrire pour nourrir sa mif au 14e siècle, après la mort de son mari. Commençant par la poésie, elle est couverte de hype et s’attaque ensuite à des traités militaires, politiques ou sociaux, genre La Cité des dames en 1405 qui parle de condition féminine.

Sans être féministe au sens moderne du terme -on dans un mood Moyen Âge-, l’autrice dénonce le manque d’éducation des jeunes filles et proteste contre la misogynie du Roman de la Rose, livre le plus apprécié de l’époque. Ses prises de position et la diversité de son œuvre mettent un coup de pression aux auteurs de l’époque et aux historiens, qui n’hésitent pas à la descendre à la moindre occasion. Mais grâce aux projets comme Cherchez la femme ! sur Arte, we know better.

 


Claire Roussel