Sujet n°1 : Le Prince Charmant est-il un gros taré ?*

 

Le concept : ce qu’il y a de plus intéressant dans la série You, c’est son personnage central, Joe Goldberg, interprété par Penn Badgley. Une espèce de Barbe Bleue/Dexter qui a une conception pour le moins psychotique et névrotique de ”l’amour” et des relations de couple.

 

Le truc intéressant : Joe est un anti-héros, à la fois pervers-narcissique de haut vol, et petit-ami idéal. Son motto pourrait ressembler à celui de n’importe quel Prince Charmant : rencontrer “la femme idéale”, la sauver et la combler (bref : la posséder). Mais parce que les femmes ne sont pas des fantasmes mais de vraies personnes (scoop), Joe se fracasse le nez sur le portail de la réalité. Et pète un câble.

Le débat : à la base, Joe est un anonyme. Un petit libraire mignon du coin, timide utilisateur d’Insta, qui aime Hemingway et se faire des films tout seul dans son salon. Le genre de gars, en fait, qu’on aurait pu rencontrer sur Tinder ou ailleurs. Mais en faisant du personnage de Joe un monstre, un vrai (un tueur en série quoi), la série nous peint le portrait d’un mec bien loin de notre réalité. Too bad pour l’identification.

 

*(OUI)

 

 

Sujet n°2 : La “femme idéale" est-elle une grosse arnaque ?*

 

Le concept : la vie entière du personnage principal est orchestrée autour de la figure de la “femme idéale”. La vraie, la bonne, celle de ses rêves les plus fous. Pour Joe, chaque femme dont il tombe amoureux est ce “you”, ce “toi”, ce truc unique entre le fantasme et la vraie personne. Bref : cette meuf parfaite dans son imperfection (parce qu’on n’est pas des bêtes, quand même).

Le truc intéressant : Joe est l’illustration même du gars qui se prend pour un type ordinaire. Un “gars bien” dont les femmes (dangereuses pour l’homme, c’est bien connu) viennent troubler l’équilibre en dévastant tout sur leur passage. Du coup, la série a le mérite de questionner ce mythe complètement sexiste du “crime passionnel”. En montrant à quel point c’est le rejet des femmes pour ce qu’elles sont (= pas un fantasme, ni un mythe) qui conduit le personnage principal à cette escalade de violence. Un motif qu’on retrouve d’ailleurs bien souvent chez les groupes masculinistes radicaux, et dans tous les discours qui entourent la haine des femmes.

 

Le débat : pour maintenir la fragile réalité de son (ego) trip en place, Joe utilise les femmes comme des guides suprêmes, des figures du Bien qui l’aident à devenir le meilleur de lui-même. Compliqué, du coup, pour les “meufs de Joe” de sortir du rôle étriqué qu’il a choisi pour elles. Résultat : la série a du mal à passer le test de Bechdel, et montre en négatif un problème (politique) qu’elle pourrait critiquer plus directement.

 

*(OUI)

 

 

Sujet n° 3 : Les réseaux sociaux ont-ils signé la fin de l’espoir en l’humanité ?*

 

Le concept : toute la série s’appuie sur le comportement de stalker de Joe Goldberg. Du genre organisé et obsessionnel, il a un processus bien établi. Rencontrer une femme, se faire un film, la stalker sur Insta, sur Facebook, puis établir une stratégie pour rentrer dans sa vie et son intimité.

Le truc intéressant : une bonne partie de l’intrigue de You s’appuie sur l’utilisation des réseaux sociaux de ses protagonistes : ce qu’ils laissent voir, ce qu’ils ont envie de montrer, et les fantasmes que cela génère. Elle montre la dangerosité d’un espace non-réglementé où chacun·e est (sur)-exposé·e (= Internet). Elle parle de stalking, de ghosting, de mecs chelous, bref : elle prend à bras le corps des problématiques de notre temps.

 

Le débat : critiquer les réseaux sociaux, c’est bien, MAIS être constructif c’est mieux. En diabolisant le personnage de Joe, la série ne se donne pas la peine de faire aboutir sa réflexion ailleurs que dans un délire un peu catastrophiste, du genre à faire peur à vos grands-parents (“tu passes ce compte en mode privé TOUT DE SUITE !!!”).

 

*(NON)