On ne connait pas bien l’inceste : VRAI

 

Dans sa définition originelle, l’inceste est une relation sexuelle entre deux personnes de la même famille dont le mariage est interdit. En France, l’inceste n’est donc pas considéré comme un crime ou un délit si les rapports sont consentis. Mais par extension, on utilise ce terme pour définir les violences sexuelles perpétrées sur un·e mineur·e par un·e ascendant·e du cercle familial, partant du principe que les victimes étant des enfants ou des jeunes adolescents, elles ne sont absolument pas consentantes.

 

Ça inclut donc les parents, les grand-parents, les arrières-grand-parents, les tantes et oncles, les beaux-parents, les tuteur·rice·s, mais aussi les frères et sœurs et les cousin·e·s s’iels sont plus âgé·e·s que la victime, et bien sûr tout le cercle des potentiel·le·s beaux-pères et belles-mères, de leurs enfants aux grands-parents en passant pas les oncles, tantes et cousin·e·s.

 

Le crime incestueux peut prendre la forme d’un viol mais aussi de ce qu’on appelle des “attouchements” qui sont en fait ni plus ni moins des agressions sexuelles.

 

 

1 personne sur 10 est victime d’inceste en France : VRAI mais...

 

C’est déjà énorme mais c’est seulement une estimation basse, recueillie par un sondage d’Ipsos pour l’association Face à l’inceste en 2020. Ca revient à environ 6,7 millions de personnes en France, ce qui veut aussi dire qu’en moyenne, 1 Français·e sur 3 connaît une victime d’inceste.

📸 Unsplash / Francesca Zama

 

 

Dans un autre sondage mené en 2019 par Ipsos pour l'association Mémoire Traumatique et Victimologie, on apprend aussi que 90% des agresseurs sont des hommes, et 83% des victimes sont des filles. Une majorité rejoint par les chiffres du sondage Ipsos x Face à l'Inceste qui calculait en 2020 que 78% de victimes étaient des filles.

 

Malheureusement, on peut imaginer que les chiffres réels sont bien pires, à cause du tabou qui maintient les victimes dans le silence, de l’âge des victimes, de l’influence des agresseurs, parfois de la peur de faire éclater des familles, mais aussi à cause de l’amnésie traumatique qui empêche les victimes d’accéder à leurs souvenirs parfois pendant plusieurs années.

 

 

C’est impossible d’oublier un événement aussi traumatisant : FAUX

 

Au contraire. Le cerveau est si bien fait que pour nous protéger, il va occulter des évènements trop douloureux et traumatisants quand il ne se sent pas capable de les processer. Flavie Flament et Andréa Bescond, toutes les deux victimes de violences sexuelles dans leur enfance, ont expliqué ce processus psychologique dans Quotidien.

 

Souvent, les souvenirs refont surface grâce ou à cause d’un élément déclencheur, qui peut prendre la forme d’un nouveau traumatisme comme une autre agression, ou parfois une simple scène de film ou le passage d’un livre. Et quand ça arrive, la mémoire revient avec une grande violence. Les victimes n’ont pas eu droit au temps qui polit les souvenirs et apaisent la peur et la douleur. Elles peuvent se souvenir de détails, d’odeurs, de mots, des décennies après les faits, comme si tout s’était passé hier.

📸 Unsplash / Francesca Zama

 

 

A ce sujet, vous pouvez regarder le témoignage de Maëvanne, victime d’inceste par son grand-père qui a connu 20 ans d’amnésie traumatique, ou consulter les informations de l'association Mémoire Traumatique et Victimologie.

 

 

On peut porter plainte toute sa vie : FAUX

 

Le délai de prescription ne permet pas aux victimes de porter plainte après leurs 48 ans, soit 30 après leur majorité. De nombreuses victimes et associations se battent pour retirer le délai de prescription des textes de lois, notamment en mettant en avant l'argument de l’amnésie traumatique, sans succès pour le moment.

 

 

Le Sénat veut réduire l'âge de la majorité sexuelle : FAUX

 

Le Sénat étudie actuellement une proposition de loi pour considérer tout rapport sexuel avec un·e mineur·e de moins de 13 ans comme automatiquement non consenti. C’est une avancée, sachant qu’aucune loi française ne fixe de majorité sexuelle à 15 ans comme on l’entend souvent. Mais 13 ans, est-ce suffisant ? Non pour de nombreuses associations et victimes.

 

 

Le crime incestueux n'est jamais de l'amour : VRAI

 

L'inceste n'est jamais le symptôme d'un "amour trop fort" ou d'une maladresse de tendresse, c'est un crime grave qui détruit les victimes. Ce n'est pas non plus forcément lié à la pédocriminalité. Les agresseurs incestueux sont rarement des pédocriminels, leurs actes font partie d'un continuum de violences, que ce soit porté sur leur partenaire, sur d'autres femmes et enfants, ou même sur des animaux.

📸 Unsplash / Trevor Buntin

 

 

Comme l'explique Charlotte Pudlowski et ses interviewé·e·s dans le podcast Ou peut-être une nuit, il est intimement lié aux rapports de domination instauré par le partriarcat. La société est intrinséquement organisée autour de la figure du père, dans la famille #patriarche, mais aussi dans la religion (le pape), ou même le monde du travail (avec les entreprises paternalistes), etc.

 

Dans un témoignage sur France Culture, un père incestueux explique qu'il pensait que comme c'était "sa" fille, elle lui appartenait, et par extension, son corps lui appartenait, qu'il pouvait en profiter comme bon lui semblait, sans prendre en considération les conséquences désatreuses sur son enfant, et en excusant ses actes, comme la société et l'impunité des agresseurs excusent et minimisent en permanence la violence des hommes.

 

 

L’inceste fait partie des top recherches sur les sites porno : VRAI

 

Dans son dictionnaire des sexualités fraîchement paru, La Vulve, La Verge et le Vibro, Maïa Mazaurette aborde le thème du “fauxceste”, qui désigne des productions pornographiques mettant en scène des incestes fictionnels. Comme l’explique l’autrice : « le fauxcest occupe les quatrième, cinquième et sixième rangs des recherches mondiales, avec respectivement les mots-clés “belle-mère”, “belle-fille” et “maman” ».

Cet engouement s’explique bien sûr par le fantasme de la transgression, mais participe aussi à généraliser et valider les fantasmes incestueux.

 

 

Personne ne parle de l’inceste : VRAI et FAUX

 

Clairement : l’inceste reste un énorme tabou. Le silence forcé des victimes, celui complice de leur entourage, le manque de formation des professionnel·le·s, le délai de prescription... rien n'aide à la prise de parole.

📸 Unsplash / Eugenia Maximova

 

 

Mais des médias et des personnalités publiques prennent de plus en plus la parole, et des livres, des podcasts et des films s’écrivent sur ce sujet. On pense notamment aux podcasts Ou peut-être une nuit de Louie Media et La fille sur le canapé d’Axelle Jah Njiké, et au roman Un amour impossible de Christine Angot.

 

 

Il existe des ressources pour les victimes d’inceste : VRAI

 

On vous a parlé de l’association Face à l’Inceste, mais vous pouvez aussi vous adresser directement à la brigade des mineur·e·s (même si vous êtes aujourd’hui majeur·e) ou écrire au Procureur de la République du Tribunal de Grande Instance. Le numéro d’écoute de Fil Santé Jeune est aussi une bonne ressource : 0 800 235 236. Enfin, le 116 006 est un numéro d’écoute mis en place par le gouvernement pour aider toutes les victimes, y compris d’inceste, ou leurs proches qui souhaitent leur venir en aide.

 

Si besoin, vous pouvez aussi nous contacter ici. Surtout : ne culpabilisez pas si vous avez peur de parler, respectez votre rythme, pensez à vous et à la façon dont vous avez envie de faire les choses. Vous pouvez aussi commencer par parler à un·e psy, à des ami·e·s, à votre famille choisie. Si vous êtes proche d'une victime, ne forcez pas cette personne à parler ou dénoncer, écoutez-la si elle en a besoin, soyez présent·e, accompagnant·e.

 

On pense fort à toutes les victimes, on vous envoie tout notre courage et on continuera de faire du bruit sur le sujet pour briser les tabous, toujours.